Lorsqu’Elon Musk a racheté Twitter pour 44 milliards de dollars en octobre 2022, il a promis une révolution : une plateforme plus libre et moins censurée. Deux ans plus tard, le réseau social rebaptisé X, est méconnaissable, marqué par une radicalisation des débats et une explosion de la désinformation. Entre les fake news, la montée en puissance de l’extrême droite et la prolifération de contenus pornographiques, la mutation de Twitter soulève des questions cruciales sur les limites de la liberté d’expression et la responsabilité des plateformes.
Dès son arrivée à la tête de Twitter, Musk a licencié plus de la moitié des employés, notamment ceux chargés de la modération. Il a rétabli les comptes bannis, y compris ceux de figures controversées comme Donald Trump ou Andrew Tate, et a démantelé les protections contre la désinformation. De plus, avec la fin de la certification gratuite, l’algorithme favorise désormais les comptes X Blue, c’est-à-dire ceux qui paient un abonnement mensuel. Résultat : des influenceurs extrémistes et des propagandistes ont vu leur audience exploser, reléguant au second plan les médias traditionnels et les experts. X a également accéléré la propagation de fausses informations. Le conflit israélo-palestinien et la guerre en Ukraine en sont des exemples frappants : images détournées et discours manipulatoires sur la plateforme. Le problème ? X ne semble plus en capacité de modérer efficacement ces contenus. Pire, certains tweets trompeurs sont amplifiés par le système de monétisation : plus une publication suscite de l’engagement (même négatif), plus son auteur gagne de l’argent.
Autre effet du laxisme de X sous Musk : la montée en puissance des contenus pornographiques et violents. Si Twitter a toujours toléré la nudité, les limites ont explosé avec la diminution des contrôles. Des vidéos explicites circulent librement, parfois sans filtre, et l’exploitation de mineurs est devenue une inquiétude majeure. Des marques comme Apple ou Disney, soucieuses de leur image, ont déserté la plateforme, réduisant les revenus publicitaires de Twitter. En voulant favoriser une liberté totale, Musk a fragilisé le modèle économique de son propre réseau social.

L’évolution de Twitter a largement favorisé l’extrême droite, permettant à des figures comme Tucker Carlson, Jordan Peterson ou Eric Zemmour de voir leur influence se renforcer. Dans ce climat, les discours xénophobes et antiféministes prospèrent, souvent sous couvert d’« opinions dissidentes ». Ce déséquilibre du débat public pousse de nombreuses voix progressistes, ciblées par le harcèlement en ligne, à quitter la plateforme, renforçant ainsi la domination de la droite radicale. Plus grave encore, Musk lui-même a confirmé son alignement idéologique en multipliant les gestes et déclarations polémiques : son soutien affiché à l’AfD en Allemagne ou à Nigel Farage au Royaume-Uni, ainsi que son salut nazi lors d’un événement récent, mettent en cause la neutralité de la plateforme.
Le pari d’Elon Musk était de faire de Twitter un espace de parole totalement libre. Mais sans régulation, le réseau est devenu un espace chaotique où les informations fiables se noient dans un océan de désinformation et d’extrémisme. La liberté d’expression, chère à Musk, peut-elle exister sans limites ? Ou bien assistons-nous à la chute d’un réseau autrefois essentiel au débat mondial ?
L’avenir nous le dira. Mais une chose est sûre : Twitter, tel qu’on l’a connu, n’existe plus.
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